Guérir un problème de santé chronique grâce à la neuroplasticité – Partie 1: Comment votre cerveau peut aggraver vos symptômes ?

Vous souffrez d’une maladie chronique et guérir vous parait impossible ?

Cet article est fait pour vous.

Longtemps scindés et opposés l’un à l’autre dans la classification des différentes pathologies, corps et cerveau sont pourtant indissociables.

En agissant sur votre activité cérébrale, vous pouvez impacter l’ensemble des processus biochimiques de votre corps et ainsi retrouver une meilleure santé.

Dans la première partie de cet article, vous comprendrez pourquoi votre cerveau peut vous desservir et aggraver l’ampleur de vos symptômes et de vos problèmes de santé au fil du temps.



Sommaire



Un bouleversement dans la manière de traiter les maladies chroniques


Avec l’essor des neurosciences, la façon de traiter les maladies chroniques tend, dans un futur proche, à connaitre un profond bouleversement.

Des recherches scientifiques récentes attestent que les mécanismes faisant perdurer la maladie dans le temps (et de ce fait dégradant votre santé) ne seraient pas forcément dûs à la pathologie en elle-même mais à certaines modifications biochimiques empêchant la guérison (pour plus de précisions voir l’article : « Ce que vous devez savoir si vous souffrez d’une maladie chronique – Pourquoi vous ne guérissez pas ? »).

Ainsi, d’ici quelques décennies, le suivi médical visant à endiguer vos symptômes grâce à diverses médications pourrait être remplacé par des protocoles thérapeutiques ciblant plus spécifiquement le cerveau.

L’objectif étant d’exploiter les capacités plastiques de celui-ci, la neuroplasticité, pour aller mieux.

La neuroplasticité, c’est quoi ?


Notre cerveau cherche en permanence à optimiser nos capacités en fonction des ressources énergétiques disponibles et de notre environnement.

Pour cela, une automatisation des processus les plus souvent utilisés se met en place dans notre cerveau que ce soit pour nos mouvements, nos pensées, notre langage, nos actions et réactions…

En effet, notre cerveau créé des schémas cérébraux qui vont s’activer de plus en plus rapidement et facilement à mesure que nous les utilisons. A l’inverse, les circuits qui ne sont plus mobilisés vont avoir tendance à s’amoindrir voir à s’effacer complètement.

Ce processus indispensable à la survie de l’homme permet de nous adapter à l’environnement dans lequel nous évoluons.

En effet, à quoi bon conserver des circuits cérébraux actifs, et donc couteux en énergie, pour des capacités et habilités dont nous n’aurions plus jamais l’utilité dans notre vie.

Ce merveilleux phénomène adaptatif est ce qu’on appelle la neuroplasticité : la capacité de notre cerveau à  configurer ses réseaux neuraux, les moduler et les modifier en fonction du contexte.

Seulement la neuroplasticité n’est pas toujours bénéfique. En effet, si vous souffrez d’une maladie chronique, elle peut même vous desservir et amplifier vos symptômes.

Les effets pervers de la neuroplasticité dans le cadre d’une maladie chronique


Comme pour un muscle, nous perdons les capacités que nous ne mobilisons plus et ce processus peut aller relativement rapidement.

Ce phénomène que les neuroscientifiques nomment le « use it or lose it », ou en français le « non usage acquis », peut devenir délétère dans le cadre d’une maladie chronique.

En effet, à cause des symptômes, vous aurez tendance à ne plus effectuer certaines activités et à ne plus mobiliser certaines capacités, qu’elles soient physiques ou cognitives, à cause de votre maladie qui restreint vos capacités.

Le cerveau étant plastique, les chemins neuraux qui ne sont plus mobilisés auront tendance à s’effacer pour allouer l’énergie disponible à des réseaux activés plus fréquemment et donc plus utiles au regard de votre situation.

Il faut savoir que votre cerveau se modèle et se structure en fonction des perceptions, interactions et actions que vous avez avec votre environnement.

De ce fait, une difficulté qu’elle soit « physique », « organique » et/ou « psychologique » impactera forcément, de par ses répercussions sur vos comportements et perceptions, votre cartographie cérébrale (c’est-à-dire l’organisation et l’activation de vos réseaux neuronaux).  En retour le remodelage de vos circuits cérébraux se traduira dans votre physiologie.

Ainsi, dans le cadre d’une maladie chronique, votre cerveau de par son caractère plastique peut entrainer une aggravation des dysfonctionnements organiques, systémiques, biochimiques dus à la maladie….

TEDx du Dr. Lara BOYD: Neuroscientifique et chercheuse spécialisée dans la neuroplasticité

Pour illustrer comment ce phénomène peut être préjudiciable dans le cadre d’une maladie chronique, vous trouverez ci-dessous deux exemples de comment la neuroplasticité peut augmenter vos symptômes si vous ne mettez rien en place pour contrer ce phénomène.

sfc L’Encéphalomyélite Myalgique / Syndrome de Fatigue Chronique (EM/SFC)

Exemple 1:
L’Encéphalomyélite Myalgique / Syndrome de Fatigue Chronique (EM/SFC)

Le cas du syndrome de fatigue chronique illustre parfaitement ce cercle vicieux où s’autoalimente limitations physiques dues aux symptômes et perte des connexions cérébrales appropriées, empêchant le patient de retrouver ses capacités physiques « normales » (c’est-à-dire antérieures à la maladie).

En effet, l’état d’épuisement constant vécu par le patient le contraint à passer de nombreuses heures en position allongée.
La maladie affectant, entre autres, la capacité physiologique du corps à récupérer de l’énergie suite à un effort même minime, le patient n’a d’autres choix que de se reposer au maximum (Pour plus d’informations sur cette pathologie cliquez sur : « Syndrome de fatigue chronique : le mystère enfin résolu ? »).

Les patients souffrant d’une forme sévère du syndrome de fatigue chronique ont souvent connaissance des conséquences physiques de cet alitement constant plus particulièrement des risques de déconditionnement physique du à la fonte musculaire. Les muscles n’étant plus sollicités, une atrophie musculaire se met en place.

Cependant, ce que les médecins n’expliquent pas (et n’ont d’ailleurs peut-être pas connaissance), c’est que le fait de rester allongé aura également un impact sur le cerveau du patient et va modifier sa cartographie cérébrale aggravant ainsi en retour sa capacité à mobiliser les dits muscles.

Prenons un exemple concret parmi de nombreux autres avec le système nerveux autonome. Le fait d’être rarement debout risque d’impacter les connexions neurales liées à la régulation de la tension artérielle lors du changement de position et/ou debout.
En effet, celles-ci étant de moins en moins mobilisées, elles peuvent avoir tendance à s’activer de manière anarchique et désordonnée créant ainsi de plus en plus d’étourdissements et de vertiges chez la patient au changement de position et/ou en étant debout.


Le malade rentre ainsi dans un cercle vicieux dont il aura les plus grandes difficultés à sortir seul. Dus aux symptômes insupportables en position debout, il restera d’autant plus souvent couché, affaiblissant ainsi les chemins neuraux nécessaires à la régulation de sa pression artérielle, qui auront tendance à s’effacer ou à s’activer de manière inappropriée du fait de leur non mobilisation (en réalité la régulation de la pression sanguine étant dépendante du système nerveux autonome, les circuits cérébraux ne s’effacent jamais réellement mais leur mobilisation peut devenir extrêmement difficile).


Note spécifique pour les personnes souffrant de l’EM/SFC 

Expliqué ainsi, cela pourrait vous laisser croire que votre situation est sans espoir. Ce n’est pas le cas. Rassurez vous ce phénomène de « non usage acquis » peut être contrecarré et ce processus inversé mais pas en utilisant les protocoles proposés actuellement le plus souvent par la médecine. Thérapies cognitivo- comportementales et reprise graduée d’une activité physique sont contre-productives voir peuvent être délétères et aggraver la situation des patients souffrant de l’EM/SFC.

Bientôt en ligne : deux articles traitant du sujet seront mis en ligne : un sur les protocoles thérapeutiques basés sur la neuroplasticité pour les maladies chroniques (accessible ici) et un basé sur une revue détaillée et critique des thérapies prônant une guérison possible de l’EM/SFC (GUPTA, Lightning Process, DNRS, ANS Rewire…).



On retrouve également les conséquences de ce mécanisme du « use it or lose it » dans les maladies dégénérescentes. Prenons pour illustration la maladie Parkinson.

La maladie de Parkinson
Exemple 2:
La maladie de Parkinson

Cette maladie, caractérisée par la perte des neurones dopaminergiques dans le cerveau, entraine l’affaiblissement de l’automatisation des mouvements
Cependant, le phénomène de « non usage acquis » amplifie également la neurodégénérescence sans que les médecins ne le précisent forcément.

 Le fait que les patients, du fait de la complexité à effectuer certains mouvements, ont tendance à les éviter en utilisant d’autres stratégies pour mener à bien ce qu’ils ont à faire, va aggraver leurs difficultés à se mouvoir et à effectuer les dits mouvements. En pensant se faciliter les choses, le patient accélère sans le savoir ses symptômes.

En effet les circuits cérébraux alloués aux dits mouvements n’étant plus mobilisés, ceux-ci vont avoir tendance à s’activer de plus en plus difficilement, voir à s’effacer complètement, rendant la possibilité d’effectuer certains mouvements encore plus difficiles voir totalement impossibles.

C’est pour cela qu’il est si important pour les personnes souffrant de la maladie de Parkinson de continuer à avoir une activité physique et de mobiliser une grande variété de mouvements par le biais de séances de kinésithérapie par exemple.

De même, effectuer des activités corporelles couplant mouvements, attention et apprentissage telles que la danse, le tai chi… est une bonne façon de stimuler la création de nouveaux circuits cérébraux mais également d’empêcher la perte des circuits associés aux mouvements automatiques.

Contrecarrer ainsi l’effet « use it or lose it » permet de ralentir les effets de la neurodégénérescence des neurones dopaminergiques.

Le mécanisme de « non usage acquis »


Le phénomène du « non usage acquis », expliqué ci-dessus dans le cadre de deux pathologies spécifiques, se retrouve dans la majorité des maladies chroniques.

Ainsi le corps est doublement impacté par la non-mobilisation de certaines capacités et mouvements à cause de la maladie.

Le cerveau pensant s’adapter au contexte peut donc nous desservir si l’on n’y prend pas garde.

Mais ce n’est pas le seul dans notre cerveau qui peut freiner une éventuelle guérison.

La plus ancienne partie du cerveau, basée dans le tronc cérébral, peut également se mettre en mode alerte et nous mener à une santé dégradée pensant pourtant nous protéger.

Quand notre cerveau passe en mode survie


Comme expliqué dans l’article : « Un nouvel espoir pour soigner les maladies chroniques grâce à la neuroplasticité », notre système nerveux est cablé pour nous garder en santé.

De manière complètement autonome, sans que l’on en ait conscience, il régule l’ensemble de nos processus biologiques pour que nous puissions mener à bien nos activités quotidiennes.

Cependant, lorsque l’on souffre d’une maladie chronique, notre système nerveux, dépassé, ne réussit plus à maintenir correctement cet équilibre physiologique.

Sous l’effet du stress physiologique dû à la maladie les mécanismes de défense cellulaires sont activés de manière chronique   « cela a effet de désinhiber le système nerveux sympathique et l’axe hypothalamo-hypophysaire qui domine pendant la maladie »

Le cerveau, en réponse aux changements métaboliques, maintient actif les systèmes de défense de l’organisme et inhibe l’accès à la partie du système nerveux autonome permettant la croissance, la santé et la récupération.

De plus, il faut savoir que dans le cadre d’une maladie chronique, l’activation des systèmes de défense s’autorenforce avec le temps, rendant de plus en plus difficile la possibilité pour le corps de retrouver son équilibre.

 C’est ainsi qu’un mécanisme en charge de nous défendre, nous protéger et nous garder en vie finit par nous rendre de plus en plus malade.

Pensant protéger le corps d’une menace ou d’un danger, il a finalement pour conséquence d’ancrer encore plus profondément les dysfonctionnements du corps voir d’en augmenter les symptômes.

Des chercheurs émettent ainsi l’hypothèse que cette dysrégulation du système nerveux autonome jouerait un rôle primordial dans le maintien des maladies chroniques.

Que faire pour aller mieux ?


Dans cet article, vous avez pu mieux comprendre comment votre cerveau peut jouer un rôle important dans le maintien de vos problèmes de santé . Ceci par le biais de deux mécanismes adaptatifs qui se retournent contre vous dans le cadre d’une maladie chronique :

  • Le « non usage acquis » du à la neuroplasticité
  • L’activation constante des systèmes de défense de votre organisme

Cependant, la bonne nouvelle c’est que vous n’êtes pas obligé de subir ces phénomènes. Vous pouvez agir et vous aider à regagner vos capacités perdues avec la maladie.

Alors comment faire pour enrayer voir inverser ces processus ?

C’est ce que je vous explique dans la deuxième partie de l’article « Guérir un problème de santé chronique grâce à la neuroplasticité » intitulé  « 4 mécanismes à connaitre pour guérir le corps grâce à votre cerveau » .

Dans cet article, vous comprendrez comment il est possible de stopper et reprogrammer le cerveau pour stopper ces phénomènes délétères pour votre santé et ainsi aller mieux.

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Références


Doidge Norman (2010). « Les étonnants pouvoirs de transformation du cerveau ». Pocket

Doidge Norman (2017). « Guérir grâce à la neuroplasticité ». Pocket

Naviaux, R.K. (May 2019). “ Metabolic features  and regulation of the healing cycle —A new model for chronic disease pathogenesis and treatment.” Mitochondrion, (46), 270-297

Porges, Stephen W. (2017). « The pocket Guide to the polyvagal theory – The Transformative Power of Feeling Safe ».The Norton series on interpersonal neurobiology.


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